Je laissais, un jour, Facebook vendre mon attention à ses annonceurs. Je nourrissais l’algorithme avec plaisir et entrain. Je vis alors un vieillard qui chantait avec un jeune homme. Giddess Chalamanda. Le chant a échappé au filtre de mon intellect. Il s’est fait aimer sans ma consciente permission.
Plus tard, j’apprendrais le nom du vieillard, Giddess Chalamanda. J’apprendrais aussi une ou deux choses sur le Malawi. Comme placer le pays sur une carte. Né au Malawi, Giddess a près d’un siècle de vie. Sa voix est pourtant toujours vivante, pleine d’émotion et d’histoires.
J’ai appris un peu plus sur l’autre artiste du Malawi. Le jeune-homme, Namadingo. Chalamanda, à 90 ans, lui a dit : « rejoins-moi ». J’ai écouté Mapulani (mot d’origine anglophone ?). Le lunetteux y parle de ses plans pour une jeune fille, lui qui n’en avait jamais eu. Demande en mariage, dot, robe de mariée, Namadingo parle d’amour dans un clip simple et sobre.
Revenons à la chanson qui m’a emmené dans cette partie de l’Afrique. Une des « Afriques » desquelles on ne parle pas assez dans « mon » Afrique. Le chant raconte des histoires. Celle d’un enfant, intelligent, aimé de ses parents. Celle d’un fils dont le père s’en va, sans jamais revenir, sauf pour hanter ses rêves, la nuit. A 12 ans, Giddess a vu son père partir pour l’Afrique du Sud avec une promesse : je reviendrai pour toi…
Un fils dont le père s’en va, sans jamais revenir, sauf pour hanter ses rêves…
La chanson parle d’un mariage, qui n’a pas encore eu lieu. Giddess chante aussi une catastrophe. La colère de Napolo qui aurait emporté James Ingram, chef de prison coloniale du Nyassaland. Le corps de l’homme, emporté par le courant, aurait été repêché par des prisonniers. Et pour finir, un rêve d’enfant. Avoir assez d’argents pour atteindre et parcourir les Etats-Unis, terre de « liberté » qui aujourd’hui pourtant, questionne ses fondements. En 2016, Giddess Chalamanda a accompli ce rêve.
Au-delà de mon expérience avec ce chant, j’ai appris deux choses. Giddess aurait eu un peu plus de lumière que ce billet n’aurait pas été écrit, du moins pas de cette manière. Les cristaux ont besoin de lumière et de regard pour briller.
Aussi, pour moi, la force des langues qui ne se parlent pas avec des mots s’est confirmée. Je me refuse un peu à les appeler « arts ». Je les imagine s’insinuer dans tous les domaines, peu importe leurs coquilles. Mais déjà, en Afrique, valorisons nos artistes. Mettons plus de nous dans nos sciences.
Est-ce moi ou on n’entend pas assez parler d’Afrique en Afrique ? Réponds-moi en commentaire. À très bientôt.
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